Aladdin

Pays USA
Durée 86mn
Année 1994
Réalisation John Musker, Ron Clements
Production Buena Vista
Musique originale Alan Menken
Scénario Ron Clements, Ted Elliott

Synopsis :
Aladdin trouve une lampe magique dans laquelle était enfermé un génie. Celui-ci peut réaliser trois de ses vœux les plus chers. Mais Jafar, infecte Vizir du Sultan, désire cette lampe plus que tout pour s'emparer du pouvoir.

La cour intérieure comme lieu de recueillement

Les films Disney sont connus pour fonctionner sur un véritable système symbolique dont les éléments sont des sortes d'unités structurelles du film d'animation disneyien, réutilisables et invariables. Ainsi Aladdin ne s'illustre pas par l'originalité dans la symbolique exploitée. Cependant celle-ci reste suffisamment imposante pour supporter le sens d'une histoire qui comme bien d'autres chez Disney s'appuie sur un conte de fée, ou plus exactement sur un des Contes des Mille et Une Nuits ; Simbad le marin.
La série de contes qui compose les Mille et Une Nuits fait elle-même partie d'un conte dans lequel une femme doit, pour conserver la vie, raconter chaque soir un conte différent à l'homme qui désire la tuer (rendu fous par la tromperie de sa femme, il s'est juré de posséder toutes les vierges du royaume et de les tuer une fois la vierge déflorée). Lorsqu'elle achève le dernier conte, l'homme est purgé de ses pulsions de mort, délivré de ses angoisses grâce aux solutions apportées par chaque conte et ne désire plus tuer cette femme.

Aladdin est l'histoire de la rencontre de deux personnes qui proviennent de milieux incompatibles, dont les aspirations sont différentes. Leur union permettra la concrétisation de ces espérances. Mais pour notre analyse, nous en resterons à l'isolement des deux amants, Jasmine et Aladdin, car la cour n'intervient que comme lieu de ressources à puiser pour avancer positivement.

La cour intérieure du palais est le lieu où ces deux personnages vont se recueillir pour exprimer leurs angoisses et trouver une solution à leurs problèmes (quelles que soient la pertinence et la viabilité de celle-ci).

Symbolique :
Il est nécessaire de séparer le cas de Jasmine et celui d'Aladdin tant leur rapport à cette cour intérieure est différent. Jasmine veut être libre de voir le monde et de choisir la personne qui l' accompagnera. Elle veut s'enfuir de sa cage en or et la cour lui donnera les éléments nécessaires à son envol. Aladdin, lui, ne désire rien de plus que d'obtenir l'existence dorée de Jasmine et la cour lui rappelle à un moment décisif d'où il vient et ce qu'il vaut. Il est important de préciser dès maintenant que la configuration des lieux n'est pas la même selon que l'un ou l'autre des personnages s'y trouve.
Jasmine: La cour de Jasmine se compose d'un parterre de sable entouré d'herbe et d'arbres au centre duquel trône une grande fontaine circulaire (quadrature du cercle ?) au centre de laquelle s'élève un oeuf d'où l'eau s'écoule. On accède à cette cour soit en passant par une arche et en descendant des escaliers (le père de Jasmine) soit en franchissant une autre arche composée d'un pigeonnier et d'une colonne (le spectateur). Un tigre en est le gardien. Jasmine est une jeune fille en pleine résolution de son complexe d’œdipe : Elle refuse (castre) tous ses prétendants car seul l'amour de son père lui importe. La mère est évincée par la beauté naissante de la jeune fille. Mais le père ne cesse de rappeler à Jasmine qu'il n'est pas éternel et que seul un homme de son âge pourrait lui convenir 'surmoi incarné par la loi et l'éthique du royaume). Jasmine, déçue, agit de manière à déplaire à son père en refusant tous les prétendants, en libérant les pigeons blancs de leur cage (projection de ses désirs de liberté sur d'autres avant de passer elle-même à l'acte), en frappant le reflet de son père dans l'eau de la fontaine. Ainsi, elle semble être partagé entre un principe de plaisir mal géré et un principe de réalité qui se concrétise lentement. La cour intérieure lui porte conseille car s'est effectivement une image de la mère positive (œuf matriciel-en plus d'être virginal - tourné vers la terre, image de la lune, de la mère) qui pousse son enfant vers le monde extérieur, l'aidant ainsi à résoudre son complexe d'œdipe (le tigre, malgré sa peine, aide Jasmine à "faire le mur" du palais).
Par la suite, la jeune femme découvrira le monde et trouvera sur son chemin Aladdin. Cette liberté n'a pas été immédiate et c'est en puisant dans les ressources de la cour intérieure que Jasmine se détache de son père et acquière la maturité pour sortir de son cocon protecteur.
Aladdin
: Pour lui, la cour est un espace du palais, ce qui représente déjà beaucoup mais malheureusement, il reste en bas et dans l'obscurité à gauche alors qu’il désire être en haut, dans la lumière et nécessairement à droite. La cour est donc pour lui un espace de doute et de réflexion (para-masturbatoire si l’on porte de l'intérêt au singe d'Aladdin devenu éléphant et qui ne cesse de tenter d'éplucher une banane de ses pattes maladroites) , où il réalise que même s'il à pris l'apparence d'un prince, il reste un vaurien et un imposteur. Plutôt que de révéler ses véritables sentiments pour Jasmine, il préfère, de peur d'être rejeté, passer pour ce qu'il n'est pas grâce à la magie. Mais cela ne peut durer, et cette solution ne lui apportera d'ailleurs que des problèmes (c'est dans la cour qu'il se fait prendre par la garde de Jafar - le vizir machiavélique) et ce n'est qu'en démontrant sa richesse intérieure qu'il sera admis dans le cœur de la femme et dans celui de son père. La cour intérieure est donc pour lui, le lieu de l'avertissement qui pousse à la réflexion et à la maturité mais dont Aladdin ne sait entendre la raison à cause de son manque de confiance en soi.

Esthétique et Filmique :
-Pénétration dans l'espace intime de la cour par glissement entre des éléments du premier plan (pigeonnier et d'une colonne ou bien entre des arbres)
-Systématiquement la gauche pour le passé et le repli sur soi et la droite pour l'ouverture au monde et le futur.
-Le bas et le sombre / le haut et le lumineux
-Référence Shakespeare (balcon et jardin des amants de Vérone)
-Filmique servant la narration mais relativement pauvre de sens et de forme

Action et Narration :
La cour est l'espace grâce auquel Jasmine s'échappe du palais et Aladdin accède au balcon de sa bien-aimée. Il est aussi le lieu dans lequel Aladdin se fera capturer. C'est un espace important car il porte les choix des personnages.


© Association Fous d'Anim. Association loi 1901, fev.2002
pour le texte D.Courtine
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